Plus-values professionnelles : règles d’imposition

📝 Modifié le 16/12/2022 | Par Didier Majerowiez (Avocat)

Une plus-value professionnelle constitue un gain exceptionnel réalisé par une entreprise, lors de la cession d’un élément de son actif immobilisé.

Cette mutation à titre gratuit ou à titre onéreux peut intervenir soit en cours d’exploitation, soit en fin d’exploitation.

Quelles sont les entreprises concernées ?

Sont concernées les sociétés relevant de l’impôt sur les sociétés, les sociétés de personnes fiscalement translucides (à l’exception des sociétés à prépondérance immobilière ayant une activité purement patrimoniale), ainsi que les entrepreneurs individuels relevant de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC, des BNC, ou encore des bénéfices agricoles.

Quelles sont les cessions concernées ?

Il s’agit des cessions d’éléments qui font partie de l’actif immobilisé de l’entreprise.

Autrement dit, ne sont pas concernées les transmissions de biens faisant partie du patrimoine privé d’un l’exploitant.

Il est généralement admis que le bien doit être inscrit à l’actif du bilan de la société ou de l’entreprise, et être affecté à son exploitation.

La jurisprudence admet toutefois qu’un bien puisse être considéré comme faisant parti de l’actif de l’entreprise, en raison de son utilisation professionnelle, et ce, même s’il n’est pas inscrit au bilan.

Le Conseil d’Etat a ainsi jugé que des titres peuvent bénéficier du régime des plus-values professionnelles à long terme, même s’ils ne sont pas inscrits au bilan, sous réserve qu’ils constituent des éléments de l’actif immobilisé par nature, et qu’ils soient transmis après deux années de conservation (voir en ce sens CE, 9e et 10e ch., 23 déc. 2016, n° 375746, Sté Cap Gemini : JurisData n° 2016-027765).

Fait générateur de la plus-value

Les plus-values professionnelles sont imposées au titre de l’exercice au cours duquel elles ont été réalisées ou constatées.

Toute mutation à titre onéreux ou à titre gratuit d’un élément de l’actif immobilisé affecté à l’exercice de l’activité rend la plus-value imposable.

En matière de vente, il s’agit généralement de la date du transfert de propriété du bien, à savoir la date à laquelle a eu lieu l’accord des parties sur la chose et sur le prix.

D’une manière générale, la plus-value est imposable dès lors qu’un élément de l’actif immobilisé affecté à l’exploitation est cédé ; cette cession pouvant prendre la forme d’une vente, d’un échange, d’un apport, d’un partage, ou d’une mutation à titre gratuit comme une donation.

Calcul de la plus-value

La plus-value professionnelle se calcule comme suit :  prix de cession – valeur nette comptable du bien cédé.

Pour les cessions à titre onéreux (comme les ventes), la valeur à retenir pour le prix de cession est la somme stipulée dans l’acte.

En présence d’un apport à une société, la valeur à retenir pour le prix de cession est celle des titres remis en contrepartie de l’apport.

S’il s’agit d’une mutation à titre gratuit (comme une donation), la valeur à retenir correspond à la valeur vénale du bien.

Le prix de cession est un prix net des frais et taxes inhérents à l’opération de mutation elle-même.

Peuvent donc être déduits, les commissions d’intermédiaire, les honoraires d’expertise, ou encore les frais de courtage.

Attention : en cas de dissimulation ou d’insuffisance de prix, l’administration fiscale pourrait remettre en cause le prix stipulé dans l’acte, et procéder à une rectification à la hausse du montant de la plus-value (en ce sens, voir notamment CE, 7e et 8e ss-sect., 12 mai 1980, n° 11176 : JurisData n°1980-606209). A cette rectification pourraient s’ajouter des intérêts de retard (0,2% par mois) et une majoration de 40% en cas de manquement délibéré.

S’agissant de la valeur nette comptable, il convient de faire la distinction suivante :

  • Pour les immobilisations non amortissables, la valeur correspond à celle de l’origine du bien, telle qu’elle est retranscrite dans les écritures de l’entreprise ou de la société ;
  • Pour les immobilisations amortissables, la valeur correspond à celle de l’origine du bien, mais diminuée des amortissements pratiqués et admis en déduction pour l’assiette de l’impôt.

La distinction des plus-values à court terme et des plus-values à long terme

En règle générale, constituent des plus-values à court terme :

  • D’une part, celles résultant d’une transmission à titre gratuit, ou à titre onéreux, d’immobilisations de toute nature (amortissables ou non) créées ou acquises depuis moins de 2 ans.
  • D’autre part, celles résultant d’une transmission à titre gratuit, ou à titre onéreux, d’une immobilisation amortissable détenue depuis plus de 2 ans, à hauteur des amortissements admis en déduction.

Constituent des plus-values à long terme :

  • D’une part, celles résultant d’une transmission à titre gratuit, ou à titre onéreux, d’une immobilisation non amortissable détenue par l’entreprise depuis plus de 2 ans.
  • D’autre part, celles résultant d’une transmission à titre gratuit, ou à titre onéreux, d’une immobilisation amortissable détenue depuis plus de 2 ans, pour la fraction qui excède la limite des amortissements admis en déduction.

Comment sont imposées les plus-values professionnelles à court terme ?

Il est tout d’abord procédé à une compensation entre les plus-values et les moins-values à court terme de l’exercice.

La plus-value nette à court terme est ensuite intégrée dans les résultats imposables de l’entreprise ou de la société dans les conditions de droit commun.

Pour l’entrepreneur individuel, la plus-value à court terme est imposable au barème progressif de l’impôt sur le revenu.

Il faut y ajouter les cotisations sociales SSI (sécurité sociale des indépendants), qui ont un taux compris entre 35 et 45%.

Bon à savoir : les entrepreneurs individuels peuvent demander l’étalement de l’imposition sur 3 ans des plus-values nettes à court terme réalisées en cours d’exploitation. Cet étalement se fait par fractions égales l’année de la réalisation de la plus-value et les deux années suivantes.

En cas de constatation d’une moins-value nette à court terme, celle-ci s’impute directement sur le bénéfice d’exploitation.

Si le bénéfice n’est pas suffisant pour absorber la moins-value, la fraction non imputée pourra être déduite au cours des exercices suivants, comme un déficit d’exploitation, suivant les règles de droit commun.

Comment sont imposées les plus-values professionnelles à long terme ?

Comme pour les plus-values à court terme, il est tout d’abord procédé à une compensation entre les plus-values et les moins-values à long terme de l’exercice.

La plus-value nette à long terme est imposée au taux global de 30%, incluant 17,2% de prélèvements sociaux.

Si la compensation fait ressortir une moins-value nette à long terme, celle-ci est uniquement imputable sur les plus-values à long terme réalisées au cours des dix exercices suivants.

Il n’est pas possible d’imputer la moins-value nette à long terme sur le bénéfice courant ou sur le revenu global.

A noter que dans les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, les plus-values professionnelles sont toujours à court terme.

Le report d’imposition en cas de transmission à titre gratuit d’une entreprise individuelle (donation ou succession)

Il y a un report d’imposition en cas de mutation à titre gratuit, si la donation est réalisée au profit d’une personne physique, et qu’elle porte sur l’ensemble des éléments de l’actif immobilisé affecté à l’exercice de l’activité professionnelle (ou porte sur une branche complète d’activité).

Le report d’imposition n’est pas remis en cause, si les immeubles affectés à l’exploitation ne sont pas transmis.

A noter que le report d’imposition devient une exonération définitive si le successeur poursuit l’activité pendant au moins 5 ans.

L’exploitation doit être poursuivie personnellement dans les mêmes conditions par l’héritier ou le donataire.

La même règle s’applique en cas de transmission à titre gratuit à une personne physique des parts sociales d’une société de personnes, lorsque celles-ci sont considérées comme des actifs affectés à l’exercice de l’activité professionnelle.

Le report prend fin à la date de la cession, du rachat, d’annulation ou de transmission ultérieure des biens ou des droits transmis.

Le régime du report d’imposition est optionnel.

Pour en bénéficier, les héritiers ou les donataires doivent produire un état récapitulatif des plus-values dont l’imposition est reportée, et joindre à leur déclaration d’ensemble des revenus un état de suivi de ces plus-values.

De plus, le nouvel exploitant est tenu de joindre un état identique à sa déclaration de résultat de chaque exercice couvert par le report.

L’exonération totale de la plus-value en cas de cession d’un bien immobilier détenu depuis au moins 15 ans

En cas de cession d’un immeuble inscrit à l’actif immobilisé de l’entreprise, et affecté à son exploitation : la plus-value à long terme est exonérée au bout de 15 ans.

L’exonération fonctionne comme suit : au bout de 5 ans de détention, un abattement égal à 10% par année de détention au-delà de la cinquième est pratiqué sur la plus-value.

Ainsi, les plus-values sur les biens immobiliers professionnels sont exonérées au bout de 15 années.

Le point de départ de la durée de détention correspond à l’inscription de l’immeuble à l’actif du bilan.

Cette mesure concerne tant les immeubles (bâtis ou non) affectés par l’entreprise à son exploitation, que les parts de sociétés à prépondérance immobilière, dont l’actif est principalement composé d’immeubles affectés à son activité.

En revanche, ne sont pas concernés les cessions d’immeubles de placement qui ne sont pas affectés par l’entreprise ou la société à son exploitation (exemple des immeubles loués à des sociétés tierces), ni les cessions de terrains à bâtir. Il importe peu que ces biens soient inscrits au bilan.

Exemple pratique

Un bien est inscrit à l’actif immobilisé du bilan d’une entreprise en année N, puis est cédé en année N+4.

Le prix de revient du bien était de 1.000 euros.

L’entreprise a pratiqué des amortissements correspondants à 300 euros.

Le prix de cession est de 1.200 euros.

Lors de la cession, la plus-value se calcule par la différence entre le prix de cession et la valeur nette comptable.

En l’occurrence, la valeur nette comptable est de 700 euros (1.000 – 300 euros).

La plus-value est donc égale à 1.200 – 700 = 500 euros.

Cette plus-value est à court terme dans la limite des amortissements pratiqués (300 euros).

Cette portion est imposable comme un résultat d’exploitation.

La plus-value est à long terme pour le surplus (200 euros).

Cette fraction est imposée au taux global de 30%.

Si vous avez des questions ou des interrogations concernant ce sujet, n’hésitez pas à nous contacter et/ou à laisser un commentaire ci-dessous.


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A propos de l'auteur

Didier MAJEROWIEZ est Avocat au Barreau de Paris. Il possède 20 années d’expérience dans les domaines du droit fiscal, du droit du patrimoine, ainsi que du droit des sociétés.


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