Prescription fiscale : 3 ans, 6 ans ou 10 ans

📝 Modifié le 22/03/2024 | Par Didier Majerowiez (Avocat)

En matière fiscale, l’administration bénéficie d’un droit de reprise lui permettant de procéder à la correction des omissions, inexactitudes ou insuffisances lors de l’établissement ou du paiement de l’impôt.

Ce droit de reprise est strictement limité dans le temps. On parle alors de prescription fiscale.

Cela signifie que l’administration fiscale doit respecter une limite temporelle pour pouvoir procéder à des corrections d’impôt.

Lorsque le délai de reprise est expiré, la prescription fiscale est alors acquise. En pareille hypothèse, l’administration ne peut plus procéder à une rectification de l’impôt dû au titre de la période concernée.

Il existe différents délais de prescription fiscale selon les impôts concernés. Ces délais peuvent le cas échéant être interrompus ou prorogés sous certaines conditions.

Cet article a pour objet de faire un point sur les règles applicables en matière de prescription fiscale en France en 2023.

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Les règles générales applicables en matière de prescription fiscale

Conformément aux dispositions de l’article L.173 du livre des procédures fiscales, en matière de taxe foncière et de taxe d’habitation, le délai de reprise de l’administration fiscale est en principe d’une année.

Il s’exerce ainsi jusqu’à la fin de l’année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due.

Ce délai très court s’explique par le fait que ces taxes ne font pas l’objet d’une déclaration par le contribuable.

L’article L.173 du livre des procédures fiscales prévoit que ce délai peut être porté à 3 années lorsque le contribuable a pu bénéficier d’une exonération de ces taxes en fonction de ses revenus, et que son impôt sur le revenu a fait l’objet d’une rectification.

Cela étant, conformément aux dispositions des articles L.169 et suivants du livre des procédures fiscales, le délai de reprise de droit commun de l’administration fiscale expire, en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés, à la fin de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due.

A titre d’exemple, pour les revenus de l’année 2022 (déclarés au printemps 2023), le délai de reprise de l’administration fiscale s’éteindra le 31 décembre 2025.

Le délai de reprise peut toutefois être étendue à 10 ans (au lieu de 3 ans) dans certains cas particuliers.

C’est notamment l’hypothèse de l’exercice par le contribuable d’une activité occulte (c’est-à-dire une activité pour laquelle le contribuable n’a fait aucune déclaration fiscale, et qu’il n’a pas déclaré officiellement).

Le délai de prescription fiscale passe également à 10 ans lorsque le contribuable n’a pas déclaré ses comptes bancaires à l’étranger, ses contrats d’assurance-vie souscrits auprès d’un organisme établi à l’étranger, ou des comptes d’actifs numériques détenus à l’étranger.

Il en va de même notamment en l’absence de déclaration d’avoirs détenus dans un trust à l’étranger.

Pour les comptes bancaires à l’étranger, le délai de reprise repasse à trois ans si le contribuable prouve que le total des soldes créditeurs de ses comptes à l’étranger n’a pas excédé 50.000 euros à un moment quelconque de l’année au titre de laquelle cette déclaration devait être réalisée.

En matière de TVA, le droit de reprise de l’administration fiscale court jusqu’à la fin de la 3ème année suivant celle au cours de laquelle est intervenue l’exigibilité de cette taxe.

S’agissant de la CFE (cotisation foncière des entreprises), le délai de reprise expire le 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle cette imposition est due.

Ce délai peut exceptionnellement passer de 3 ans à 10 ans dans l’hypothèse de l’exercice par le contribuable d’une activité occulte (ou en cas de flagrance fiscale).

Cela étant, conformément aux dispositions des articles L.180 et L.186 du livre des procédures fiscales, en matière de droits d’enregistrement et d’IFI (impôt sur la fortune immobilière), le délai de reprise court jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle intervient l’exigibilité de ces droits et impôts.

Ce délai de trois ans suppose, en matière d’enregistrement et d’IFI, que les droits et impôts aient été suffisamment révélés à l’administration fiscale (via un acte ou une déclaration spécifique).

En l’absence de déclaration ou d’acte présenté à la formalité de l’enregistrement, le délai de reprise passe alors de 3 ans à 6 ans à compter de la date du fait générateur de l’impôt (par exemple le décès du contribuable en matière de droits de succession, ou le 1er janvier de l’année d’imposition en matière d’IFI).

Dans tous les cas, l’administration fiscale doit établir l’impôt, par émission d’un rôle ou d’un avis de mise en recouvrement, avant l’expiration du délai de reprise.

A noter que les éléments qui précèdent concernent le droit de reprise de l’administration fiscale en matière d’assiette.

En matière de recouvrement de l’imposition proprement dite, les comptables publics disposent d’un délai de 4 ans, à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle (ou de l’envoi de l’avis de mise en recouvrement) pour obtenir le règlement de la dette d’impôt du contribuable.

La prescription de l’action en recouvrement est acquise en l’absence d’acte interruptif (comme une mise en demeure de payer l’impôt) ou suspensif (comme une demande de sursis de paiement du côté du contribuable) dans le délai imparti.

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Les cas d’interruption ou de prorogation du délai de prescription fiscale

Le délai de reprise de l’administration fiscale peut être interrompu dans certains cas.

En cas d’interruption du délai de reprise, l’administration fiscale bénéficie alors d’un nouveau délai pour mettre en recouvrement les droits et impôts rectifiés.

Une proposition de rectification peut interrompre le délai de reprise de l’administration fiscale, à condition qu’elle soit notifiée avant la fin de ce délai.

Cette notification a pour effet d’interrompre la prescription dans la limite du montant des rectifications proposées (sauf en présence d’un éventuel vice de procédure).

Le délai de reprise peut également être interrompu en cas de notification de bases d’imposition d’office au contribuable concerné.

Le délai de prescription peut également faire l’objet d’une interruption par des déclarations ou notifications de procès-verbaux, ainsi que par tout acte qui comporterait une reconnaissance de la part du contribuable de la dette d’impôt (par exemple une demande de délai de paiement).

Peuvent également interrompre la prescription des demandes en justice, ainsi que des actes d’exécution forcée.

Cela étant, le délai de reprise de l’administration fiscale peut être prorogée en cas de demande d’assistance administrative internationale.

A cet égard, l’article L. 188 A du livre des procédures fiscales prévoit que la prescription est prorogée jusqu’à la fin de l’année suivant celle de la réponse de l’autre Etat, et au plus tard jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant le délai initial de reprise.

La prorogation du délai de reprise suppose le respect de certaines conditions, et notamment que la demande d’assistance administrative internationale soit effectuée dans le délai initial de reprise.

Par ailleurs, l’article L.188 B du livre des procédures fiscales prévoit une prorogation du délai de reprise en cas d’ouverture d’une enquête judiciaire pour fraude fiscale. Dans ce cas, le délai de prescription est prorogé jusqu’au 31 décembre de l’année qui suit la décision du Parquet, et au plus tard jusqu’au 31 décembre de la dixième année qui suit celle de l’imposition.

En outre, l’article L.187 du livre des procédures fiscales prévoit également une prorogation du délai de reprise de l’administration fiscale en cas de dépôt de plainte pour fraude fiscale.

C’est l’hypothèse où, dans le cadre d’un contrôle fiscal, l’administration découvre des agissements frauduleux du contribuable, qui la conduise à porter plainte pour fraude fiscale.

Dans ce cas, le délai de reprise est prorogé de deux années, ce qui permet à l’administration de procéder à des rappels d’imposition au titre des deux années précédant celle de la période initialement vérifiée.

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A propos de l'auteur

Didier MAJEROWIEZ est Avocat au Barreau de Paris. Il a prêté serment en mars 2004. Il est un expert en droit fiscal, en droit du patrimoine et en droit des sociétés.


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